Institut Santé-Travail Paris-Est

Retour sur l'inauguration et la première journée scientifique de l'Institut Santé-Travail Paris-Est

10 juin 2015

L'Institut Santé-travail Paris-Est (IST-PE) a été inauguré le 10 juin 2015, à l'occasion de la 5e journée d'étude du pôle Santé & Société intitulée « La santé au travail en France : enjeux médicaux et sociaux ».

Éléments de contexte

La thématique « Santé Travail » s’inscrit dans une actualité sociale particulièrement prégnante compte tenu d’évolutions démographiques, épidémiologiques et économiques majeures. La catastrophe sanitaire de l’amiante et, plus récemment, l’augmentation des pathologies en rapport avec les risques psychosociaux (RPS) ont révélé au public combien la préservation des conditions de travail constituait un enjeu primordial de santé publique. Les discussions engagées depuis 2003 sur la prise en compte de la pénibilité du travail ainsi que les Plans Santé au Travail attestent de l’intérêt porté par les pouvoirs publics aux liens entre l’état de santé et l’activité professionnelle. 

Loin d’avoir disparu, la pénibilité au travail change de nature mais semble toujours aussi préoccupante. Les enquêtes SUMER (Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels) de 1994, 2003 et 2010 renseignent sur l’évolution des conditions de travail notamment dans le secteur privé. Si l’exposition aux contraintes physiques intenses a diminué, l’exposition à des nuisances chimiques est encore fréquente et la proportion de salariés en situation de tension au travail a, en revanche, augmenté (Dares, 2012).

Cette dynamique santé-travail s’inscrit en outre dans un mouvement général de vieillissement démographique qui se traduit par une augmentation significative de la proportion des plus de 60 ans en France qui devrait être supérieure à 30 % en 2035 (Insee). Le recul de l’âge du départ en retraite associé à des contraintes professionnelles physiques et mentales en augmentation, vont peser sur la population des plus de 60 ans, ce qui nécessitera une surveillance accrue. Le vieillissement s’accompagne d’évolutions épidémiologiques notables : une augmentation de la prévalence et/ou de l’incidence de certaines pathologies (maladies cardiovasculaires) et l’apparition d’effets différés de certaines expositions professionnelles (Parkinson et pesticides, ou cancers professionnels par exemple).

On constate enfin l’émergence de nouveaux types d’exposition professionnelle du fait de l’introduction de nouvelles technologies. Face à ces évolutions plurifactorielles, de nombreuses questions doivent mobiliser l’interconnexion des compétences disciplinaires, parmi lesquelles :

  • Comment promouvoir, dès l’entrée sur le marché du travail, la santé en milieu professionnel ?
  • Comment promouvoir l’innovation médicale et assurer sa diffusion auprès des populations concernées ?
  • Comment évaluer l’effet potentiel de certaines expositions professionnelles dont l’effet délétère à long terme est suspecté ?
  • Comment assurer la traçabilité des expositions professionnelles dans un contexte de généralisation de la précarisation des parcours professionnels ?
Les quatre axes de travail de l'IST-PE

Santé respiratoire et Travail 

Une thématique forte concerne la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), maladie très fréquente (plus de 2,5 millions de cas en France), avec de fortes répercussions sociétales et économiques et pour laquelle la composante « professionnelle » (à la fois en terme étiologique, mais également par rapport au maintien dans l’emploi) est jusqu’à présent peu investiguée (alors qu’il est admis dans la littérature que 15% des BPCO sont d’origine professionnelle). Un programme d’investigation épidémiologique financé grâce au soutien de l'Anses, comportant un volet étiologique et un volet « marqueurs biologiques » est programmé, couplé à une étude sociologique spécifique s’intéressant au maintien dans l’emploi.

Cancer et Travail 

Le champ est extrêmement vaste et concerne de très nombreux travailleurs, l’étude nationale SUMER diligentée par la Direction Générale du Travail rapportant récemment une exposition à des cancérogènes chez environ 10% des travailleurs. Dans le cadre de cet axe, il est prévu à court terme la mise en place d’un programme relatif aux facteurs étiologiques des hémopathies malignes, avec notamment une réflexion spécifique sur le rôle des pesticides, priorité affichée du récent PNSE3. 
Le champ de la surveillance après exposition à l’amiante, thématique importante du Département Santé Travail de l’InVS, est un chantier nécessitant un investissement de la recherche en santé au travail.

Évaluation des expositions professionnelles

Cet axe, couvrant un panel très large de nuisances, est essentiel dans le champ santé-travail et nécessite notamment des compétences complémentaires en toxicologie, en sciences humaines et sociales, en métrologie, etc. Dans le domaine des nuisances chimiques, l’importance d’une centralisation des données de biosurveillance (biométrologie des expositions professionnelles) a été soulignée à plusieurs reprises par diverses instances et Agences, l’enjeu étant une meilleure connaissance de la cartographie de ces expositions.
L’Anses est l’opérateur du Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P). Elle coordonne ainsi toutes les activités associées au réseau et participe aux travaux scientifiques pour une meilleure connaissance des expositions professionnelles. Lesquelles ne se limitent pas aux expositions de nature chimique, mais sont également une porte d’entrée pour l’étude des risques psychosociaux (RPS), rendue possible notamment par l’important champ des pathologies reliées aux RPS, recensées par le RVN3P.
L’objectif est le développement d’outils permettant une meilleure approche de ces risques en milieu de travail, apportant une aide aux entreprises publiques et privées.

Évaluation des politiques et programmes de santé au travail 

Ce quatrième axe, transversal par rapport aux trois premiers, vise à mettre en œuvre des outils permettant d’évaluer d’une part l’impact de problèmes de santé sur la trajectoire professionnelle, d’autre part l’impact de mesures, programmes ou dispositifs de santé au travail sur l’état de santé et l’employabilité des populations visées.
Un enjeu important de cette approche est de déterminer, à partir de l’analyse de grandes enquêtes en santé-travail, les paramètres-clés associés au maintien dans l’emploi dont la mise en œuvre devrait être promue, voire adaptée pour permettre le retour à l’emploi des personnes ayant quitté le milieu de travail.